Eylau: Precis Des Travaux de la Grande Armée
Observations
On a peine à concevoir que sure des faits aussi authentiques de d’une si haute importance, le gouvernement anglais ait osé hasarder tant de fausses allégations. Accusé par l’opinion de l’Europe d’avoir prolongé la guerre, il veut aujourd’hui écarter cette odieuse responsabilité; mais les actes même de ses agens l’accusent, et ses assertions sont démenties par les faits. S.M. ne veut, our y répondre, que produire toutes les pièces de cette négociation, dont son amour pour la paix lui avait fait espérer un meilleur résultat.
Il est fanx que le Gouvernement français ait fait, avant la négociation, aucune de ouvertures, aucune des offres que suppose la déclaration. Toutes ces suppositions ont été constamment déniées pendant le cours de la négociation par le ministère de S.M. Il est faux que le Gouvernement français ait accepté la prétendue base qui est établie dans la déclaration, ni que S.M. britannique se soit réservé, avant d’entrer en négociation, de ne traiter que de concert avec ses alliés.
Il sera facile de se convaincre, par les réponses du ministre des relations extéricures, a M. Fox, et sur-tout par celle no. VI, que si le cabinet anglais avait tenu à cette réserve, jamais la négociation n’aurait pu s’ouvrir. Il sera facile de se convaincre par le texte même des plains-pouvoirs de lord Yarmouth, et plus évidemment encore par la lecture de la lettre de lord Lauderdale, no. XIII, qu’avant de commencer la négociation, le cabinet anglais s’était entièrement et irrévocablement désisté de la prétention de traiter conjointement avec ses alliés. Comment un gouvernement oset-il se mettre ainsi publiquement en contradiction avec lui-même?
L’exposé des faits qu’on va lire n’est pas, comme la déclaration du roi d’Angleterre, une publication hasardée et qu’il fait croire sur parole. Il est appuyé sur toutes les pièces de la négociation qui serout imprimées à la suite.
En février de cette année, il souvrit entre les deux puissances une négociation directe de cabinet à cabinet. Elle commença sous de favorables auspices; et en se reportant à cette époque, on aime à rappeler un trait digne du noble caractère du ministre que l’Angleterre a perdu. Une lettre de M. Fox à S.A. la prince de Bénévent, le prévint qu’un individu s’était présenté à lui et avait offert d’attenter à la vie de l’Empereur. (Voy. cette lettre et la réponse du prince, nos. I et II).
Les bases de la négociation s’établirent ensuite dans les lettres que s’écrivirent successivement les deux ministres; et après des discussions franches et soutenues avec ce ton de biensèance qui convient aux ministres de deux grandes puissances, il fut convenu qu’on adoptetait pour base de la négociation, les deux principes suivans; Io. que les deux Etats auraient pour objets sommun que la paix fût pour eux et leurs alliés respectifs, en même tems qu’elle serait de nature à assurer, autant qu’on le pourrait, le repos futur de l’Europe; 2o. qu’il serait reconnu, en faveur de l’une et de l’autre puissance, qu’elles auraient tout droit d’intervention et de garantie pour les affaires continentales et pour les affaires maritimes. (Voyez les nos. III et VIII). C’est à ces principes éconcés dans les notes de deux ministres, que le Gouvernement français s’est uniquement et presévéremment référé.
Lord Yarmouth vint à Paris’ il présenta des pleins, pouvoirs, et la négociation marcha vers son but. Il n’est point vrai, comme on l’avance dans la déclaration de S.M. britannique, que le cabinet des Tuileries, que n’est pas assez mal habile pour traiter avec des lord Yarmouth. La forme en est la même que celle des pouvoirs de lord Manchester en 1763, et les autorisations en sont mêmes plus complètes et plus étendues. (Voy. les nos. XI et XII).
Mais la cour de Londres trouva que les progrès déla discussion étaient trop rapdes; elle craiguit quelque entraînment a la paix. Pour tout ralentir, elle envoya sous le même titre un second ministre plénipotentiaire; et bientôt elle le laissa seul, lui prescrivant d’attendre dans une négociation apparente, le parti que predrait la Russie sur la traité qui venait d’être négocié et conclu à l’aris en son nom.
On ose avancer dans la déclaration de S.M. britannique, que M. d’Oubril n’avait pas de pouvoirs pour traiter, et que S.M.l’Empereur et Roi avait pris dans ce traité même des engagemens qui, s’ils eussent été remplis, auraient amené la paix entre les deux cours. La lectare des pleins-pouvoir et du traité (Voyez nos. XXXIX et XL.) répondra suffisamment à cette fausse allégation.
La France n’a pas eu le tort de manquer aux engagemens du traité qu’elle avai fait avec la Russie; mais elle a eu celui de les rempl’r avec trop de confiance et de précipitation. A peine la pax fut-elle signée, qu’elle ordonna de cesser la course contre le pavillon russe, et de rétablir toutes les relations commerciales avec la Russie.
Jusques-là tout était d’accord. La Russie et l’Angleterre avaient traité séparément, et la France n’avait eu d’autre but que celui de simplifier les discussions qui pouva ent amener un rapprochement durable, en refusant d’admettre ces deux puissances à négocier de concert, et à confondre des intérêts qui par leur nature étaient essent ellement distincts. Le traité avec la Russie était fait, la négociation avec l’Angleterre approchait rogressivement de son terme; cette puissance se voyait en mesure de conclure à des conditions avantageuses pour elle, puisqu’elle gardait Malte et la Cap de Bonne-Espérance.
Inutile modération de S.M.I. et R..M. Fox tomba malade, il cessa d’assister au conseil, la faction ennemie de la paix prévalut et tout changea. Lord Lauderdale vint à Paris, la négociation se compliqua aussitôt et prit une marche rétrograde. On ne put se défendre du soupçon qu’il était venu pour la rompre, et qu’on l’avait choisi, comme ami de M. Fox, pour faire tomber sur les partisans de cet illustre ministre tout l’odieux de la rupture.
M. Fox aurait facilement dissipé cette intrigue, mais il allait mourir. Lord Lauderdale habitué à suivre un chef, ne dissimula plus le desir d’en trouver un dans le parti contraire, et de se rallier à d’autres principes. Son ton fut d’accord avec ses nouvelles vues : toutes ses lettres, toutes les réponses du gouvernement (Voy. les nos. XIII, XIV, XV, XVI, XVII, XVIII, XIX, XX, XXI, XXII, XXIII, XXIV, XXV, XXVI, XXVII et XXVIII) prouvent à quel point S.M.I. tenait au rétablissement de la paix par la longue patience avec laquelle son ministère a supporté tant de brusqueries et d’emportemens. Elle ne voulut pas sacrifier à des questions de susceptibilité l’espérance même la plus éloignée d’un rapprochement entre les deux puissances.
Cependent l’Angleterre en suivant cette étrange négociation cherchait de toutes parts à lui susciter de nouveaux ennemis. Elle envoyait une escadre dans le Tage pour sonder l’opinion du Portugal dt chercher à l’entraîner; elle menaçait la Porte Ottomane et lui offrait son alliance : elle intriguait en Russie pour faire changer le ministère qui avait envoyé M. d’Oubril, et préparait ainsi le refus de la ratification deson traité de paix : elle excitait la Prusse contre la France en lui persuadant qu’elle perdrait le Hanovre, province que la France lui avait laissé prendre, mais qu’elle n’avait garantie qu’autant que la Prusse ferait cause commune avec la France pour obliger l’Angleterre à faire la paix.
Les instigations de l’Angleterre auprès de la Prusse, ont eu tout les succès qu’elle en attendait. Cette puissance déclara la guerre, lord Lauderdale demanda ses passeports et partit pour Londres.
M. Fox a voulu la paix. Tant qu’il a dirigé les affaires, les négociations ont été loyales et franches; après lui, on n’a eu qu’un objet en vue, celui de les rompre, d’éluder par tous les moyens due mensonge et de la mauvaise foi, la responsabilité de la rupture, et de redonner à la guerre plus d’étendue, dans l’espérance qu’une nouvelle coalition serait plus fatale à la France, ou que du moins les nouveaux dangers de l’Angleterre se détourneraient sur ses alliés.
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