Eylau: Precis Des Travaux de la Grande Armée
Lettre de Napoleon à le Sénat sur Prusse: 7 Octobre 1806
Lettre de S. M. NAPOLÉON-LE-GRAND, à messieurs les président et membres du Sénat; précédée du discours de S. A. S. Mgr. le prince Cambacérès, archi-chancelier de l’Empire; suivre de deux rapports addressés à Sa Majesté l’Empereur et Roi, par le prince de Bénévent, ministre des relations extérieures, et de plusieurs notes intéressantes relatives à la déclaration de guerre entre la France et la Prusse.
Le 14 octobre, à midi, en exécution des ordres de S. M. l’Empereur et Roi, S. A. S. Mgr. le prince archi-chancelier de l’Empire, s’est rendu au Sénat.
Le prince a été reçu avec le cérémonial accoutumé; et, après avoir pris, séance, il a dit:
MESSIEURS,
“La lettre que S. M. l’Empereur et Roi écrit au Sénat, et les communications que je viens faire de sa part ont pour objet de vous instruire d’une résolution devenue nécessaire par la conduite du gouvernement prussien.
Lettre de S. M. l’Empereur et Roi.
“SÉNATEURS,
“Nous avons quitté notre capitale, pour nous rendre au milieu de notre armée d’Allemagne, dès l’instant que nous avons su avec certitude qu’elle était menacée sur ces flancs par des mouvemens inopinés. A peine arrivé sur les frontières de nos Etats, nous avons en lieu de reconnaître combien notre présence y était nécessaire et de nous applaudir des mesures défensives que nous avons prises avant de quitter le centre de notre Empire. Déjà les armées prussiennes, portées au grand complet de guerre, s’étaient ebranlées de toutes partes; elles avaient dépassé leurs frontières; la Saxe était envahie, et le sage prince qui gouverne était forcé d’agir contre sa volonté, contre l’intérêt de ses peuples. Les armées prussienes étaient arrivées devant les cantonnemens de nos troupes. Des provocations de toutes espèces, et mêmes des voies de fait avaient signalé l’esprit de haine qui animait nos ennemis, et la modération de nos soldats, qui, tranquille à l’aspect de tous ces mouvemens, étonnés seulement de ne recevoir aucun ordre, se reposaient dans la double confiance que donne le courage et le bon droit. Notre premier devoir a été de passer le Rhin nous-mêmes, de former nos camps, et de faire nos guerriers. Des marches combinées et rapides les ont portées en un clin-d’oeil au lieu que nous leur avons indiqué. Tous nos camps sont formés; nous allons marcher contre les armées prussiennes, et repousser la force par la force. Toutefois, nous osons le dire, notre coeur est péniblement affecté de cette prépondérance constante qu’obtient en Europe le génie du mal, occupé sans cesse à traverser les dessins que nous formons pour la tranquillité de l’Europe, le rèpos et le bonheur de la génération présente, assiégeant tous les cabinets par tous les genres de séductions, et égarant ceux qu’il n’a pu corrompre, les aveuglant sur leurs véritables intérêts, et les lançant au milieu des partis, sans autre guide que les passions qu’il a su leur inspirer. Le cabinet de Berlin lui même n’a point choisi avec délibération le parti qu’il prend; il y a été jeté avec art et avec un malicieuse adresse. Le roi s’est trouvé tout-à-coup à cent lieues de sa capitale, aux frontières de la confédération du Rhin, au milieu de son armée et vis-à-vis des troupes françaises dispersées dans leurs cantonnemens, et qui croyent devoir compter sur les liens qui unissaient les deux États, et sur les prostestations prodiguées en toutes circonstances par la cour de Berlin. Dans une guerre aussi juste, où nous ne prenons les armes que pour nous défendre, que nous n’avons provoquée par aucun acte, par aucune prétention, et dont il nous serait impossible d’assigner la véritable cause, nous comptons entièrement sur l’appui des lois et sur celui des peuples, que les circonstances appellent à nous donner de nouvelles preuves de leur dévouement et de leur courage. De notre côté, aucun sacrifice personnel ne nous sera pénible, aucun danger ne nous arrêtera, toutes les fois qu’il s’agira d’assurer les droits, l’honneur et la prospérité de nos peuples.
“Donné en notre quartier-impérial de Bamberg, le 7 octobre 1806.”
Signé, NAPOLÉON.
Par l’Empereur,
Le ministre secrétaire-d’état, signé, H. B. MARET.
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