Eylau: Precis Des Travaux de la Grande Armée
La réponse de Fox à la lettre de Tallyrand de 16 avril 1806: 21 avril 1806.
Dowing-S reet, ce 21 avril 1806.[sic][1]
No. VII – Monsieur, j’ai reçu avant-hier la dépêche de V. Ex., du 16 de ce mois.
Après l’avoir lue et relue avec toute l’attention possible, je n’y trouve aucun argument suffisant pour induire notre gouvernement à changer l’opinion qu’il a déjà énoncée; savoir, que toute négociation où la Russie ne serait pas comprise comme partie, est absolument inadmissible.
Nons voulons la paix; mais nous ne pouvons rien vouloir qui puisse porter atteinte, ou à la dignité de notre souverain, ou à l’honneur et aux intérêts de la nation.
Or, si nous traitons sans la Russie, vu les liens étroits qui nous unissent à cette puissance, nous nous croirons exposés au reproche d’avoir manqué à cette fidélité scrupuleuse dans nos engagemens, dont nous nous faisons gloire; tandis que de l’autre côté, en persistant dans notre demande, que la Russie soit admise, nous ne croyons rien faire qui soit contraire au principe d’égalité que nous réclamons tous les deux.
Lorsque les trois plénipotentiares se trouveront ensemble, comment croire qu’on pût rien emporter par la pluralité des voix? ou même qu’une assemblée pareille eût rien de commun avec un congrès général? Il n’y existerait effectivement que deux parties: d’un côté, la France; de l’autre, les deux puissances alliées.
Au surplus, si l’on voit tant d’avantages dans une affaire de cette nature à se trouver deux contre un, il n’y aurait aucune objection à ce que vous fissiez intervenir celui de vos alliés que vous jugeriez à propos.
Desirant sincèrement d’éviter des disputes inutiles, je ne me permets pas d’entrer dans la discussion des conséquences que V. Exc. tire des évènemmens de la dernière campagne.
Je remarquerai seulement en passant que je ne vois pas par quelle raison une alliance doit être envisagée comme nulle par rapport aux puissances qui y tiennent, parce qu’une de celles qui la composaient, en a été détachée par les malheurs de la guerre.
Quant à l’ouverture que la Russie vous a faite; nous ne avons ce qui en est; mais qu’elle qu’en soit la nature, nous sommes persuadés que cette cour ne se conduira jamais de manière à compromettre la loyauté reconnue de son caractère, on d’affaiblir les liens d’amitié et de confiance qui subsistent entre elle et l’Angleterre.
Pour revenir au point, V. Exc. dit que dans la négociation proposée, elle ne voit que trois formes possibles de discussion; la première vous paraît inadmissible.
D’après ce que j’ai eu l’honneur de vous écrire; vous devez juger, Monsieur, que la troisième est incompatible, tant avec nos idées fondamentales de la justice et de l’honneur, qu’avec notre aperçu des intérêts de notre pays, La seconde n’est pas peut-être mauvaise dans son principe; mais outre les délais qu’elle causerait, elle ne serait guère praticable dans la conjoncture actuelle.
C’est donc avec bien du regret que je dois déclarer nettement à V. Exc., que je ne vois nul espoir de paix dans ce moment ci, à moins que chez vous on ne se dispose à traiter dans la forme que nous avons proposée.
Je crois devoir ajouter que cette forme nous est essentielle, non-seulement pour les raisons que j’ai eu l’honneur de développer à V. Exc., mais en tant que toute autre pourrait faire naître des soupçons que de fait vous entreteniez le projet chimérique qu’on vous reproche (à tort, comme j’aime à le croire), de nous exclure de toute relation avec les puissances du continent de l’Europe, et même qu’une telle idée est moins révoltante pour nous qu’elle ne devrait l’être et qu’elle ne l’est en effet. Ce n’est pas à un ministre aussi éclairé que V. Exc. qu’il puisse être nécessaire de déclarer que l’Angleterre ne peut jamais consentir à une exclusion qui la dégraderait du rang qu’elle a tenu jusqu’ici, et qu’elle croit pouvoir toujours tenir parmi les nations du Monde.
La chose enfin se trouve réduite à seul point: Veut-on traiter conjointement avec la Russie? oui. Veut-on que nous traitons séparément? non.
Bien que nous n’ayons pas réussi dans le grand objet que nous nous sommes proposés, les deux gouvernemens n’ont qu’à se louer de l’honnêteté et de la franchise qui out caractérisé la discussion de leurs différens; et je vous dois sur mon compte particulier, M., des remerciemens de la manière obligeante dont V. Exc. s’exprime à mon régard.
Je vous prie d’aggréer les assurances de ma considération la plus distinguée.
J’ai l’honneur d’être, de V. Exc. le très-humble et très-obéissant serviteur, C. T. Fox.
Editor’s Comments:
[1] The date of this letter, as published in the book, is 11 April 1806. This must be a mistake since Fox is referring to Tallyrand’s letter of 16 April.
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