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Eylau: Precis Des Travaux de la Grande Armee

Military Subjects: Battles & Campaigns

 

Eylau: Precis Des Travaux de la Grande Armée

Rapport du Talleyrand à Napoleon: 15 novembre 1806

Rapport du ministre des relations extérieures à S. M. l’Empereur et Roi

Sire, une quatrième coalition s’est formée: en moins d’un mois, elle a été confondue; en moins d’un mois la Prusse a vu son armée, ses places fortes, sa capitale et ses provinces tombées au pouvoir de V. M.; et maintenant elle implore la paix.

Dans les coalitions précédentes, chaque ennemi de la France, dès qu’il était vaincu, demandait aussi et obtenait la paix.  On espérait que des paix particulières et successives conduiraient à une paix générale, honorable et sûre.  Trois fois cette espérance a été déçue; trois fois l’expérience a prouvé qu’en suivant le même système de modération et de générosité, la France serait constamment trompée.  Chaque coalition détruite a enfanté nouvelle coalition, et la France a été menacée d’une guerre éternelle.

L’Empire français est parvenu à un dégré de puissance et de grandeur que V. M. n’ambitionnait pas.  Attaquée de toutes parts avec une fureur sans exemple, et placée dans l’alternative de périr ou de vaincre, la France n’a combattu que pour son salut, et , victorieuse, elle ne s’est servie de la victoire que pour faire éclater sa modération.  Elle n’a point détruit ceux qui la voulait détruire; elle avait fait d’immenses conquêtes, elle n’en a gardé qu’un petit nombre; elle en aurait encore moins gardé, si les aveugles passions qui rugissaient autour d’elle, ne l’eussent pas mise dans la nécessité de s’aggrandir pour se préserver.  Aujourd’hui qu’elle est attaquée pour la quatrième fois avec le même esprit de haine et dans les mêmes vues de destruction, V. M. n’a d’autre but que de recouvrer ce qui est indispensable à la prospérité de son peuple.  Mais c’est un but qu’elle ne saurait atteindre qu’en profitant de toute la grandeur de ses avantages, et en réservant ses conquêtes comme objets de compensation dans les arrangemens de la paix générale.

Deux puissances ennemies du repos de l’Europe se sont unies pour y perpétuer la discorde et la guerre.  Les objets de leur ambition sont différens; mais une même haine les anime contre la France, parce qu’elles savent que la France ne peut cesser de s’opposer à l’accomplissement de leurs pernicieux desseins.  Occupées sans cesse à lui chercher, à lui susciter des ennemis, elles emploient à cet effet tous les moyens d’artifices et d’intrigues, les menances, les caresses, la corruption, la calomnie; et, quand elles aspirent à tout envahir, à tout opprimer, à tout asservir, c’est la France qu’elles accusent d’y prétendre.

L’Angleterre tend à naviguer exclusivement sur les mers.  Elle s’arroge le monopole de tous les commerces et de toutes les industries, et toutes les fois que l’irrésistible force des événemens a obligé la France d’intervenir dans les affaires des petits Etats ses voisins, et d’y intervenir pour leur repos, l’Angleterre a donné le signal des accusations et des plaintes.  La première elle a sonné l’alarme, et parce que quelques villes ou quelques pays soumis depuis des siècles à l’influence de la France, y étaient encore soumis, elle a présenté la France comme menaçant l’indépendance des grands Etats.  Etait-ce sur des petits Etats, qui fussent soumis depuis des siècles à son influence, et comme entraînés dans sa sphère d’activité?  n’était-ce pas au contraire sur des Etats considérés dans tous les tems comme principaux en Europe, que l’Angleterre exerça ses violences, lorsque les puissances du Nord, qui s’étaient unies pour défendre les principes éternels de la neutralité, furent forcées de fier, avec leurs propres intérêts, les plus chers intérêts de la France?  Alors l’indépendance des nations ne fut pas seulement menacée; elle fut attaquée, violée, et autant qu’il dépendait de l’Angleterre, anéantie.  De quoi servit-il que l’Angleterre eût été obligée de reconnaître, par la convention de Pétersbourg, un petit nombre de principes que, ni ses séductions, ni ses menaces n’avaient pu faire abandonner?  Immédiatement après, elle les foula ouvertement aux pieds, ou les éluda, en abusant, de la manière la plus tyrannique à-la-fois et la plus insensée, du droit de blocus.  Ce droit ne peut, d’après la raison et d’après les traités, s’appliquer qu’aux places investies et en danger d’être prises.  Elle prétendit l’étendre aux hâvres, à l’embouchure des rivières, à des côtes entières, enfin à tout un Empire.  Certes, la France ne fut jamais investie et en danger d’être prise par l’Angleterre, et la France toute entière a été déclarée en état de blocus.  En agissant de la sorte, l’Angleterre n’annonce-t-elle pas hautement qu’elle ne reconnaît aucune loi, que les traités ne sont rien pour elle, qu’elle n’admet d’autre droit que celui de la force, et qu’elle répute legitime tout ce qu’elle peut impunément faire?

Le gouvernement de Russie, quand il devrait être occupé uniquement du soin de vivifier ses immenses Etats, et d’expier par les bienfaits d’une age législation et d’une administration paternelle, le crime qui fit en un jour descendre du rang des nations indépendantes, une nation ancienne, nombreuse, illustre et digne d’en meilleur sort, convoite et menace d’engloutir encore le vaste et superbe empire des Ottomans.  Les mêmes manoeuvres qu’il employa contre la Pologne, il les emploie aujourd’hui contre la Turquie.  Il souffle dans ses provinces l’esprit de sédition et de révolte.  Il excité, il arme, il soutient les Serviens contre la Porte.  Il renouvelle, sur la Morée, les tentatives qu’il avait faites, mais sans fruit, en 1778.  La Valachie et la Moldavie étaient gouvernées par deux chefs infidèles et traîtres; la Porte les avait déclarés tels par un firman, et les avait déposes.  La Russie, non contente de leur donner asile, a fait marcher des troupes sur Dniester, et, menacant la Porte de lui déclarer la guerre, elle exigé leur rétablissement.  La Porte a eu la douleur de se voir contrainte de remettre en place ses ennemis déclarés, et de déposer les hommes de son choix.  Ainsi, son indépendance à été violée par un attentat qui blesse à-la-fois la dignité de tous les trônes.  Du moment qu’elle n’a plus le choix de ses gouverneurs, elle n’est plus souveriene, elle est vassale, ou plutôt la Valachie et la Moldavie ne lui appartiennent plus que de nom; et ces deux grandes et riches provinces, gouvernées par des hommes vendus à la Russie, sont devenues pour celle-ci une véritable conquête.

Avec de tels ennemis, dont la modération de V. M. n’a pu désarmer la haine, et qui, nonobstant ses victoires, marchent toujours à leur but, n’écoutant que leur passion, et ne respectant aucun droit, V. M. n’est pas libre de suivre les mouvemens de sa générosité.  Le penchant même qui la porte à désirer la paix lui fait une loi de ne se dessaisir d’aucune de ses conquêtes, que l’indépendance entière et absolue de l’Empire ottoman, indépendance qui est le premier intérêt de la France, ne soit reconnue et garantie; que les colonies espagnoles, hollandaises et françaises, dont la diversion opérée par les quatre coalitions a seule entraîné la perte, ne soient restituées, et qu’un Code général ne soit adopté, conforme à la dignité de toutes les couronnes, et capable d’assurer les droits de toutes les nations sur les mers.

La justice et la nécessité de cette détermination seront universellement senties; elle sera un bienfait pour les alliés de V. M., et pour toutes les villes commercantes de son empire, qui n’ont été dépouillées qu’à la faveur de ces mêmes guerres dont les événemens ont mis au pouvoir de V. M. tant de vastes états.  Dans tout autre système, les intérêts de ces alliés et de tant de cités populeuses seraient abandonnés, le fruit des plus étonnantes victoires serait perdu, et la France, au milieu de triomphes inouis, après tant d’exploits qui l’ont agrandie et comblée de gloire, n’aurait aucune perspective de repos; elle n’entreverrait pas l’époque oû elle pourrait déposer les armes, se consacrer aux paisibles occupations de l’industrie et du commerce, auxquelles la nature l’appelle, et faire, sur un autre théâtre, des conquêtes moins éclatantes, mais plus douces, qu’elle n’aurait point achetée par l’effusion d’un sang qui lui est si cher, et qui égalant son bonheur à sa gloire, ne coûteraient à l’humanité aucunes larmes.

Signé, CH. M. TALLEYRAND, prince de Bénévent.

Berlin, le 15 novembre 1806.

 

 

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