Eylau: Precis Des Travaux de la Grande Armée
Décret sur le blocus continental : 21 novembre 1806
Extrait des minutes de la secrétairerie d’État.
En notre camp impérial de Berlin, le 21 novembre 1806.
NAPOLÉON, EMPEREUR DES FRANÇAIS ET ROI d’ITALIE, considérant: 1o. quel’Angleterre n’admet point de droit des gens suivi universellement par tous les peuples policés;
2o. Qu’elle répute ennemi tout individu appartenant à l’Etat ennemi, et fait en conséquence prisonniers de guerre, non-seulement les équipages des vaisseaux armés en guerre, mais encore les équipages des vaisseaux de commerce et des navires marchands, et même les facteurs du commerce et les négocians qui voyagent pour les affaires de leur négoce;
3o. Qu’elle étend aux bâtimens et marchandises du commerce et aux propriétes des particuliers, le droit de conquête, qui ne peut s’appliquer qu’à ce qui appartient à l’Etat ennemi;
4o. Qu’elle étend aux villes et ports de commerce non fortifiés, aux hâvres et aux embouchures des rivieres, le droit de blocus, qui, d’après la raison et l’usage de tous les peuples policés, n’est applicable qu’aux places fortes; qu’elle déclare bloquées des places devant lesquelles elle n’a pas même un seul bâtiment de guerre, quoiqu’une place ne soit bloquée que quand approcher sans un danger imminent; qu’elle déclare même en état blocus des lieux que toutes ses forces réunies seraient incapables de bloquer, des côtes entières et tout un Empire;
5o. Que cet abus monstrueux du droit de blocus n’a d’autre but que d’empêcher les communications entre les peuples, et d’élever le commerce et l’industrie de l’Angleterre sur la ruine de l’industerie et du commerce du Continent;
6o. Que tel étant le but évident de l’Angleterre, quiconque fait sur le Continent le commerce des marchandises anglaises, favorise par-là ses desseins et s’en rend le complice;
7o. Que cette conduite de l’Angleterre, digne en tout des premiers âges de la barbarie, a profité à cette puissance au détriment de toutes les autres;
8o. Qu’il est de droit naturel d’opposer à l’ennemi les armes dont il se sert, et de le combattre de la même manière qu’il combat, lorsqu’il méconnaît toutes les idées de justice et tous les sentimens libéraux, résultat de la civilisation parmi les hommes; nous avons résolu d’appliquer a l’Angleterre les usages qu’elle a consacrés dans sa législation maritime. Les dispositions du présent décret seront constamment considérés comme principe fondamental de l’Empire, jusqu’à ce que l’Angleterre ait reconnu que le droit de la guerre est un et le même sur terre que sur mer; qu’il ne peut s’étendre ni personne des individus étrangers à la profession des armes et que le droit de blocus doit être restreint au places fortes réellemnt invéstires par des forces suffisantes.
Nous avons en conséquence décréte et décrétons ce qui suit:
Art. Ier. Les Isles-Britanniques sont déclarées en état de blocus.
II. Tout commerce et toute correspondance avec les Isles-Britannique sont interdits.
En conséquence, les lettres ou paquets adressés ou en Angleterre ou à un Anglais, ou écrits en langue anglaise, n’auront pas cours aux postes, et seront saisis.
III. Tout individu sujet de l’Angleterre, de quelque état et condition qu’il soit, qui sera trouvé dans les pays occupés par nos troupes ou par celles de nos alliés, sera fait prisonnier de guerre.
IV. Tout magasin, toute marchandise, toute propriété, de quelque nature qu’elle puisse être, appartenant à un sujet de l’Angleterre, sera déclaré de bonne prise.
V. Le commerce des marchandises anglaises et défendu; et tout marchandise appartenant à l’Angleterre, ou provenant des ses fabriques et de ses colonies, est déclarée de bonne prise.
VI. La moitié du produit de la confiscation des marchandises et propriétés déclarées de bonne prise par les articles précédens, sera employée à indemniser les négocians des pertes qu’ils ont éprovées par la prise des bâtimens de commerce qui ont été enlevés par les croisières anglaises.
VII. Aucun bâtiment venant directement de l’Angleterre ou des colonies anglaises, ou y ayant été depuis la publication du présent décret, ne sera reçu dans aucun port.
VIII. Tout bâtiment qui, au moyen d’une fausse déclaration, contreviendra à la disposition ci-dessus, sera saisi, et le navire et la cargaison seront confisqués comme s’ils étaient propriété anglaise.
IX. Notre tribunal des prises de Paris est chargé du jugement définitif de toutes les contestations qui pourront survenir dans notre Empire ou dans les pays occupés par l’armée française, relativement à l’exécution du présent décret. Notre tribunal des prises à Milan sera chargé du jugement définitif desdites contestations qui pourront survenir dans l’étendue de notre royaume d’Italie.
X. Communications du présent décret sera donnée, par notre ministre des relations extérieures, aux rois d’Espagne, de Naples, de Hollande et d’Etrurie, et à nos autres alliés dont les sujets sont victimes, comme les nôtres, de l’injustice et de la barbarie de la législation marine anglaise.
XI. Nos ministres des relations extérieures, de la guerre, de la marine, des finances, de la police, et nos directeurs-généraux des postes sont chargés, chacun en ci qui le concerne, de l’exécution du présent décret.
Signé, NAPOLÉON.
Par l’Empereur.
Le ministre secrétaire-d’Etat, signé, H. B. MAREET.
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